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Quelle est l’intentionnalité du MJPM ?

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Les interrogations autour de l’avenir de la profession de MJPM (thème du dernier colloque AFFECT qui s’est tenu à Arcachon le 1er octobre 2022) ont mis en exergue un questionnement essentiel : celui de l’intentionnalité dans l’acte professionnel du MJPM.

L’existence de trois modes d’exercice de la profession et la diversité des intentions énoncées peuvent dessiner des conceptions divergentes de ce qui fait l’essence du MJPM.

L’intentionnalité désigne, pour le philosophe Edmund Husserl « la caractéristique de la conscience d’être toujours dirigée vers un objet ».

En protection juridique des majeurs, quelle peut être cette disposition de l’esprit, ce mouvement intérieur par lequel le professionnel se propose d’atteindre ou d’essayer d’atteindre un but déterminé ?

S’agirait-il de considérer que le MJPM a pour mission de compenser les vulnérabilités de la personne protégée ? De suppléer les carences des institutions publiques, des services sociaux et autres professionnels susceptibles d’interagir avec la personne pour l’aider à répondre à ses besoins ?

Au-delà des différences de pratiques, nous pensons que l’intentionnalité de chaque professionnel est la même.

Sur ce point, nous choisissons de considérer qu’une autre voie est possible afin d’offrir à la personne protégée sa pleine place dans la société. Le MJPM agit, dans le cadre du mandat, pour que la personne puisse être sujet et non objet de droit, pour que son autonomie morale (ses choix de vie, ses valeurs) puisse se matérialiser à travers son autonomie civile[1] (son pouvoir d’agir, sa capacité à exercer ses droits).

L’article 415 du code civil dispose que la protection « est instaurée et assurée dans le respect des libertés individuelles, des droits fondamentaux et de la dignité de la personne ». Il ajoute qu’elle « a pour finalité l’intérêt de la personne protégée » et qu’elle « favorise, dans la mesure du possible, l’autonomie de celle-ci ».

En ce sens, nous estimons que le prononcé de la mesure de protection ne doit pas conduire à une disqualification des potentialités de la personne. Cette dernière est capable mais capable autrement[2].

Ainsi, nous faisons le choix de considérer que la finalité de l’action du MJPM, son intentionnalité, est de soutenir la personne protégée dans l’expression de sa volonté, sans la méjuger ou la considérer comme déraisonnable dans ses choix, de veiller au respect de ses droits, afin que l’action du professionnel n’entame pas sa qualité de citoyen et d’exercer le mandat judiciaire en respectant le devoir d’information, rempart contre l’adoption d’une posture substitutive.

Par l’outil du droit, le MJPM accomplit ainsi un acte d’attention à la personne, en constatant l’existence d’un besoin, en reconnaissant la nécessité d’y répondre et en évaluant la possibilité d’y apporter une réponse[3].


[1] F.GZIL propose de distinguer trois sens de l’autonomie : « l’autonomie fonctionnelle, qui recouvre tout ce qu’un individu sait faire ; l’autonomie morale, qui signifie que l’individu accorde de l’importance à certaines valeurs et mène une vie conforme à ses valeurs ; l’autonomie politique et sociale, qui est le pouvoir d’agir dont jouit l’individu dans la société ».

[2] E.PLAISANCE, Autrement capables – École, emploi, société : pour l’inclusion des personnes handicapées, Autrement.

[3] A.ZIELINSKI, L’éthique du care – Une nouvelle façon de prendre soin, Etudes 2010/12 tome 413 p.631 à 641

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